Prise de vue analogique; épreuves à jet d'encre pigmentaire
C’est lundi matin, le premier de ce mois de décembre. Je suis debout dans la brume, devant la porte de cette chambre, quelque part sur Terre où de subtiles effluves d’éther filtrent à travers la fermeture étanche. Poursuivant mon élan, comme la lumière absorbée par la vacuité d’un espace obscur, je m’engouffre dans cet intérieur cubiculaire, refuge métaphysique pour le corps et l’esprit.
Quelques mètres plus haut, au-dessus de ma tête, un oculus met en scène la relativité entre intérieur et extérieur. Tel un sténopé, il interroge la dynamique de l’espace et les variations atmosphériques. En son centre, un disque que j’ai auparavant placé pour évoquer la pupille d’un oeil.
Je m’allonge dans cette chambre noire, là où convergent les rayons lumineux. L’ouverture qui me domine est traversée d’événements cinématiques, dont je capte les traces et enregistre les réflectances qui s’imposent. La pellicule photographique est ma rétine, ma rétine devient pellicule. Ici à l’intérieur, le temps s’est arrêté. Dehors jusqu’au vertige, derrière le cadre fixe, s’accumulent et se dessinent des lignes parfois teintées d’irréalité. Dans ce dispositif frontal, les formes et les couleurs retracent l’épisode d’une trajectoire intime et méditative.
Des jours et des nuits durant jusqu’au prochain solstice, je voyage dans le temps et perds son cours réel. J’utilise les forces de la Nature comme énergie primaire, explorant les phénomènes optiques où de nouvelles trames de l’espace jusqu’alors invisibles se révèlent.
À la lisière des ténèbres, je suis comme Tirésias éprouvant la fragilité du sens de la vue. À l’heure de la privation, des champs inconnus apparaissent puis se défont, menacés d’être avalés par un trou noir.
Ces images existeront-elles toujours si je ferme les yeux?
Analogical Photography; inkjet print on Baryta paper
Analogfotographie; Tintenstrahldruck auf Barytpapier